Le journalisme haïtien traverse aujourd’hui l’une des périodes les plus sombres de son histoire. Loin de jouer pleinement son rôle de contre-pouvoir et de garant de la démocratie, la profession se trouve minée par la cupidité, l’opportunisme et l’absence criante d’éthique. Dans un pays rongé par l’instabilité, l’information est devenue un produit marchand, souvent manipulé au gré des intérêts politiques ou économiques.
OPTIMISTE.INFO, 11 novembre 2025.
La prolifération d’un pseudo-journalisme
La multiplication des plateformes en ligne et l’émergence de « journalistes » autoproclamés ont profondément ébranlé la crédibilité du métier. Il suffit aujourd’hui d’un téléphone et d’un micro pour se présenter comme reporter, sans formation, sans ligne éditoriale, ni respect des règles déontologiques.
Cette dérive alimente une avalanche de rumeurs, de désinformation et de prises de position partisanes déguisées en journalisme. L’espace public, saturé de contenus biaisés, se transforme peu à peu en champ de bataille médiatique.
Certains journalistes troquent désormais leur indépendance contre des enveloppes, des promesses de postes ou des privilèges. Devenus les relais de politiciens, de groupes économiques ou même de chefs de gangs, ils participent à une mise en scène où les conférences de presse tournent à la flatterie et où les enquêtes d’intérêt public disparaissent au profit de chroniques sensationnalistes ou commanditées.
Cette corruption, loin de se limiter aux sphères politiques, s’enracine également dans les médias eux-mêmes, transformant des rédactions entières en instruments de désinformation ou d’intimidation ciblée. Les rares journalistes qui continuent à défendre la vérité sont souvent isolés, marginalisés, voire menacés.
Un public désorienté et trahi
Dans ce climat de confusion, le grand perdant reste le public. Privés d’une information fiable et équilibrée, les citoyens haïtiens peinent à discerner le vrai du faux. Le journalisme, censé éclairer et émanciper, devient un outil de manipulation qui alimente la méfiance et le cynisme.
Pour un sursaut de conscience professionnelle
Le journalisme en Haïti s’est transformé, pour beaucoup, en un terrain de survie, de compromission et de renoncement aux idéaux démocratiques. Pourtant, tout n’est pas perdu.
Il est urgent que les professionnels sincères relèvent la tête, que les écoles de journalisme renforcent la rigueur de leur formation, et que les citoyens eux-mêmes exigent une presse digne de ce nom. Car tant que la presse restera prisonnière de la cupidité et des intérêts partisans, aucune démocratie véritable ne pourra s’épanouir en Haïti.
La Rédaction